Agriculteurs en colère – Ultras de l’A64 : « Les Pyrénées ne sont pas une frontière, c’est un trait d’union »

Les agriculteurs espagnols et français soudés dans la lutte aux frontières pyrénéennes.
Les agriculteurs espagnols et français soudés dans la lutte aux frontières pyrénéennes.

Depuis le début de l’année, les agriculteurs en colère ont lancé un mouvement qui prend de l’ampleur, qui interpelle et inquiète les politiques, sommés d’agir et de répondre aux revendications de la profession. Les agriculteurs de Haute-Garonne, centre névralgique et source de la contestation, sont à nouveau montés au créneau lundi 3 juin pour bloquer les passages pyrénéens, à l’appel des Ultras de l’A64. L’association est née sur l’autoroute du même nom lors du bras de fer initial, elle est présidée par Jérôme Bayle, porte-parole du mouvement.

Le long de la chaîne des Pyrénées, ils ont lancé plus d’un millier de tracteurs sur huit points de blocage ciblés, en lien avec leurs homologues des départements limitrophes et de leurs collègues Espagnols.

Dans le Boulonnais, fief de l’éleveur Bertrand Loup, initiateur avec Jérôme Bayle et Joël Tournier de la vague protestataire, la mobilisation était au rendez-vous. Ils étaient plus de 200 venus du Comminges, du Volvestre et du reste du département, à rallier Fos, sur le pont du Roi qui enjambe la Garonne, à la frontière hispano-française.

« Il faut souligner, affirme Bertrand Loup, que du côté Espagnol, Catalogne, Pays Basque et ailleurs, le mouvement est comme ici, indépendant et apolitique. On a échangé, établi un calendrier des futures actions. Des liens très forts se créés, une synergie qui a du sens. On s’est rendus compte que nous formions une fraternité transfrontalière, et qu’en fait, les Pyrénées ne nous séparaient pas, au contraire elles sont un lien entre nous. Elle n’est une frontière qu’en raison des politiques agricoles qui nous divisent artificiellement. »

Le message est clair : l’harmonisation des règles européennes, tant en termes de coût de production et d’énergies (gaz, GNR, électricité…) qu’au niveau des normes sanitaires et environnementales. « Nous avons un temps d’avance sur les hommes politiques, nous sommes des européens avant tout. Et les règles doivent être les mêmes pour tous. L’Europe doit nous défendre face aux nations extra-européennes qui ne travaillent pas nos critères, c’est essentiel. »

« Le seul bémol de cette journée, déplore Bertrand, c’est le désengagement des syndicats de la profession. A part la Coordination rurale, aucun n’était présent. A quoi servent-ils, la question se pose. Nous ne pouvons que constater que le succès de nos actions démontre leur inefficacité. »

Le gouvernement est à l’écoute et les interlocuteurs du porte-parole Jérôme Bayle se sont succédé, Marc Fesneau ministre de l’Agriculture, son directeur de cabinet, Agnès Pannier-Runacher, un conseiller d’Emmanuel Macron. Les élections européennes sont imminentes et le coup de semonce portera ses fruits, espèrent les manifestants. Les politiques sont attendus au tournant. Rendez-vous est pris le 15 août pour faire le point, puis en octobre lors du prochain conseil communautaire. « S’il n’y a pas de résultat, martèle Bertrand Loup, les frontières seront à nouveau bloquées, et le mouvement s’étendra à d’autres pays européens, car la Hollande et la Belgique se mobilisent elles aussi. »

« Dans ce moment intense, conclut Bertrand Loup, nous avons pris conscience de vivre un moment historique, une première dans l’histoire de l’agriculture, la naissance d’une cohésion nationale et transfrontalière. Une fraternité entre gens du même métier, qui nous dépasse et nous porte. »

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