Montréjeau Rentrée au collège : les réflexions d’un prof

Dominique Rech est professeur agrégé d’histoire-géographie au collège Bertrand Laralde. Amoureux de son métier, il organise, en temps normal, des visioconférences sur des sujets très divers et avec des invités de renom. Petite République lui a demandé son état d’esprit à la veille de la rentrée, soit pour les collèges le 18 mai (6e / 5e).

A noter que les principaux ne sont pas autorisés à communiquer avec la presse, c’est le rectorat qui doit s’en charger.

Petite République : que pensez-vous de la reprise des cours ?

Dominique Rech : il faut savoir que les 2/3 des parents ont peur pour leur enfant. Tous les enseignants ont également peur.

Pour les élèves, il faut que ceux-ci arrivent avec une hygiène irréprochable et on peut alors les répartir dans la classe en gardant les distances de sécurité de un mètre. Par contre, le non croisement dans les couloirs, c’est impossible à faire respecter. Je ne sais pas comment cela va évoluer à Montréjeau, mais dans tous les collèges, y compris les lycées comme Bagatelle,  il y a un manque de savon. Alors on entend dire que des masques vont être distribués aux enseignants, que des produits d’hygiène vont être mis à disposition. Dans les cas de grippes précédents, il n’en n’était rien.

L’économie doit repartir, les parents de jeunes enfants doivent reprendre le travail. C’est pour cela qu’il faut qu’on garde leurs enfants en bas âge, jusqu’au 5e, 4e. Les 3e peuvent se garder seuls.

Pas de cantine. Là où les enfants se contaminent le plus, c’est avec le pain de la cantine. Comment font les parents ?

PR : pensez-vous quand même que les parents enverront leurs enfants à l’école ?

DR : je ne le pense pas. Nous enseignants, ne pourrons pas faire cours, ce sera de la garderie. De plus, nous aurons les plus fragiles socialement, scolairement. Nous allons improviser.

PR : pour la continuité pédagogique, l’Etat vous a envoyé des moyens ?

DR : oui, nous avons reçu une page avec des logiciels et il a fallu qu’on se débrouille, ce n’était pas simple. Evaluer la compréhension d’un élève à distance, ce n’est pas évident. En classe, on le voit de suite.

Alors, on envoie des messages aux élèves en demandant comment ça va. Le ministre dit qu’on aurait « perdu » 5% des élèves. Nous enseignants dirions plutôt 40%. Un seul ordinateur pour une famille, les parents qui travaillent ou jouent dessus. Les connexions très mauvaises, le désert numérique du Comminges.

Les consignes sont également que chaque professeur principal téléphone aux parents : certains ne répondent pas, ne rappellent pas, d’autres nous disent de nous mêler de ce qui nous regarde… J’ai reçu un message d’un élève qui voulait que je l’aide pour un exercice : 4h08 du matin. Sans commentaire.

Et puis comme d’habitude, un certain mépris des enseignants. La porte-parole du gouvernement qui ose dire que « pour aider les agriculteurs, on ne va pas envoyer les enseignants ramasser des fraises ». Cela voulait dire qu’on ne faisait rien !

PR : en conclusion ?

DR : le 11 mai, il y aura la reprise. Mais est-ce que la Haute Garonne sera dans les départements déconfinés ? Si oui, la reprise se fera sur la base du volontariat, qu’on peut estimer à 30% d’enfants qui seront envoyés en classe. On fera donc une garderie, la moins ennuyeuse possible en essayant d’apporter quelque chose aux enfants. Lorsqu’on est un enseignant consciencieux, on est malheureux car on va faire du bricolage, au mauvais sens du terme.

 

 

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