Les architectes des bâtiments de France (ABF) mis sur la sellette par le premier magistrat de la commune.
Lorsqu’en 2007, la commune de Gensac sur Garonne se porte acquéreur d’un terrain de 20 000 m2 dans le but de proposer à la vente 17 lots constructibles, elle ne se doutait pas que le mal administratif français allait rendre ce projet irréalisable avec des conséquences financières désastreuses pour un petit village de 400 habitants. Nous avons rencontré son maire Henri Devic qui fait part de son désarroi, de celui de son conseil municipal et des habitants de la commune.
Monsieur le Maire, comment cela a-t-il commencé ?
En 2007 la commune de Gensac a acheté un terrain de 20000 m2 pour un montant de 86000 euros dans une zone constructible du POS, document d’urbanisme en vigueur à cette époque. Il se situe dans le périmètre du village, à côté de l’école. En 2008 , le POS est remplacé par le PLU qui est définitivement approuvé en 2009. Suite a cette approbation aucun avis défavorable ou restrictif n’est parvenu à la mairie. Au contraire toutes les administrations concernées par ce projet nous ont accordé par écrit un avis favorable. A ce moment là, les architectes des bâtiments de France ne se sont pas prononcés. Nous n’avons reçu aucun courrier de leur part pour indiquer des restrictions. De ce fait cette zone constructible située dans le POS a été maintenue pour sa totalité sur la carte du PLU. Je précise, s’il était nécessaire, que si la DDE de l’époque, le bureau d’étude ou la mairie avait eu un avis restrictif des bâtiments de France, il l’aurait fait figurer sur notre PLU, ce qui n’est évidemment pas le cas.
Que s’est-il donc passé ensuite ?
En 2012 , forte de ces approbations, la commune dépose un projet de logements sociaux. C’est alors que nous recevons un avis défavorable des architectes des bâtiments de France sous prétexte que lors de l’élaboration du PLU des réserves avaient été faites sur cette zone. Ces fameuses réserves que personne n’a eu connaissance et qui n’ont jamais été transmises à la DDE , ni au bureau d’étude , ni ici a la mairie.
La surprise fut totale et on a aussitôt interrogé les A.B.F. Ils nous ont transmis par fax une copie d’un courrier destiné à l’élaboration du PLU concernant des restrictions qui auraient été envoyées à l’époque. Un courrier non reçu dont on prend connaissance quelques années plus tard par le fax envoyé suite à notre réclamation. Les restrictions qui y sont mentionnées sont donc irrecevables puisque hors délai. Mais voilà , les architectes des bâtiments de France se valide le droit, mais de quel droit !
En ce qui concerne l’envoi de ce courrier c’est votre parole contre la leur ?
C’est vrai mais ni le bureau d’études ni l’ex D.D.E n’a rien reçu non plus. Ce n’est plus un hasard peut être ! Il est à noter que les ABF n’utilisent pas les recommandés.
Qu’en est-il de cette restriction et en quoi est-elle très préjudiciable pour la commune ?
Cette restriction nous empêche de construire sur une bande de 80 mètres en pied de coteau , ce qui réduit considérablement le projet. Il ne reste plus que 6 lots à construire qui se traduisent par un cout de viabilité de 37000 euros par lot pour une vente à 35000 euros. Le projet est donc irréalisable financièrement. Avec le projet de 17 lots proposé a l’origine, le coût de viabilité était proche de 20 000 euros ce qui le rendait cohérent et viable pour une petite commune comme la notre. De plus il était créateur d’emplois et attendu par certain nombre de personnes âgées.
Sur quoi se base les architectes des bâtiments de France pour vous opposer une telle restriction ?
Pour faire simple, nous avons dans le centre du bourg de la commune une grosse maison bourgeoise qui est inscrite au patrimoine des architectes des bâtiments de France. Une Loi indique qu’on ne peut construire dans un périmètre de 500 mètres. En nous enlevant cette bande de 80 mètres, on nous sort du périmètre.
Ceci est d’autant plus aberrant que le projet de construction et la maison bourgeoise ne sont pas co-visibles l’un de l’autre à moins de monter dans les arbres !Ils sont situés de part et d’autre du village. Or s’il n’y a pas de co-visibilité les A.B.F. émettent un « simple avis » qui n’est pas bloquant au lieu d’un « avis conforme » comme actuellement qui l’est. C’est toute la différence.
Quelles sont les conséquences pour la commune ?
Tout d’abord si on ne construit dans cette zone, la commune de Gensac sur Garonne n’a plus la possibilité de construire nulle part ailleurs. Le SCOT et la Loi Macron nous interdisent de construire à l’extérieur du village. Ensuite cet imbroglio typiquement français fait qu’aujourd’hui le conseil municipal est interrogé à juste titre par ses administrés :
- Ont -ils acheté un terrain à fonds perdus ?
- 86000 euros plus tous les frais engagés qui représentent une somme très importante pour une commune comme la notre, n’auraient-ils pu être employés à autre chose ?
- Pourquoi ce dossier n’avance-t-il pas ? 8 ans de délais, c’est du temps perdu à faire des plans, des réunions, des heures travail que personne ne prend en compte.
Que va-t-il se passer ?
La tension et la colère montent chaque jour d’avantage dans l’équipe municipale et la population qui s’interrogent sur la suite à donner. Ce ras le bol devrait se traduire par une pétition qui va être lancée et si cela ne suffit pas, on envisage même une manifestation. Trop, c’est trop ! Si cette administration semble respecter l’architecture , il serait bien qu’elle soit encouragée à respecter les citoyens.
Le début d’un bras de fer entre d’irréductibles gaulois qui veulent faire prévaloir le « bon sens paysan » et une administration dont on attend qu’elle fasse preuve d’esprit de négociation et de compromis. Un service qui n’a pu être joint en raison de la période estivale.
Affaire à suivre…