Edito 9

Il est toujours intéressant d’être un observateur privilégié de la vie publique. En évitant le piège du voyeurisme toujours malsain, on peut y voir des phénomènes pour le moins surprenant. Prenons le cas des manifestations contre la Loi sur le travail. Combien d’entre nous sommes allés sur le site de Legifrance ou de l’assemblée nationale pour voir exactement quel était le contenu de cette fameuse Loi ? Ah oui quand même ! Mais au fond est-ce bien la priorité si l’on suit de près l’actualité ?

Si l’on en croit le traitement médiatique et les réseaux sociaux, la Vérité est ailleurs car les deux camps qui s’opposent ne le font plus sur le fond mais sur la forme. On cherche à gagner la guerre des images car c’est elle qui désignera le vainqueur dans l’opinion publique. La priorité absolue est de démontrer que c’est l’autre qui est violent et qui a tort.

Muni de téléphone portable une multitude incroyable de personnes ne cessent de filmer pour démontrer qu’il y a bien eu « violences policières ». Nous avons vu la naissance de « vrais faux journalistes indépendants » qui casqués et appareillés se veulent les témoins « objectifs » des scènes qu’ils filment, même si l’angle de prises de vues est toujours tourné … vers la police. Mises sur les réseaux sociaux et à l’aide de sous-titrage qui oriente le spectateur on nous invite à voir la démonstration irréfutable de la violence policière. Parfois c’est indéniable il n’y a aucune ambiguité sur ce que l’on peut observer. Cette violence policière est, dans ce cas, condamnable. Souvent on ne voit ni l’avant, ni l’après et les images ne démontrent rien sauf à ce que le commentaire nous induise à voir cette violence. On s’attache donc aux conséquences fussent-elles humainement difficiles, jamais aux causes !

De l’autre côté, on nous montre des policiers et des gendarmes blessés parfois gravement pour démontrer que la violence n’est pas là où on la croit. Ces reportages sont illustrés par des images montrant des casseurs se livrant à des scènes de pillage ou jetant des projectiles pour le moins dangereux. Mais où est la Loi El Khomri dans tout cela ? Disparue sous le joug de l’immédiateté et du sensationnel. On nous montre jamais des manifestants qui arpentent le bitume avec la force de persuasion comme seule arme et des policiers et des gendarmes qui font correctement leur travail en préservant l’ordre public. On nous abreuve d’images qui jouent sur l’émotion et non sur la réflexion.

La manipulation et les arrières pensées sont l’apanage de tous les intervenants pour imposer leur Vérité. Il y a les pro-force de l’ordre, il y a les pro-manifestants mais on ne se parle plus, on ne se respecte plus. On ne débat pas sur les fondements de la Loi El Khomri donc on finit par croire que tout le monde s’en fout tellement les intérêts sont ailleurs.

Les signes d’une démocratie moribonde qui devra bien trouver en son sein une nouvelle manière de fonctionner. Notre République est malade et plus on attend plus le remède devra être fort et douloureux. Il est trop tard pour faire de la médecine douce et de l’homéopathie.

Pendant ce temps là, loin des caméras et des projecteurs de l’immédiateté, des centaines de migrants continuent à mourir noyés sur les côtes libyennes ou européennes. Telle les méduses en été, leur corps est rejeté par la mer pour venir s’échouer sur le sable de la honte. 1500 recensés en seulement 15 jours et on affrète des bateaux privés pour leur venir en aide lorsqu’il n’est pas trop tard. C’est notre individualisme et notre indifférence qui tue ces migrants et qui n’oblige pas nos politiques à réagir. Nous avons perdu une part de notre humanité. Pourtant il est illusoire de croire que l’on arrête la pauvreté, la misère et le désespoir. Aucun barbelé, aucune mesure ne serait les retenir. Condamnés quoiqu’il arrive à une morte certaine, ils préfèrent mourir libre qu’enchainés comme des animaux.

Allez mais il est tard Monsieur, je retourne devant mon poste de télévision et je vais regarder les matchs de football de l’euro 2016. Un verre de bière à la main, je me lèverai et je chanterai à tue tête la marseillaise quand les français joueront. Allez les bleus !

Même si j’ai un bleu à l’âme.

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