Suite à l’enquête publique (qui se termine le 3 décembre) sur le projet agrivoltaïque à Molas, l’association Sauvegarde des Terres Commingeoises communique :
« Où doit paître la vache du Comminges ? »
« Il y a 105 ans, la sculpture de la Vache d’Alan au Palais des Évêques de Comminges donna lieu à un épisode célèbre. Les habitants du village empêchèrent les antiquaires de la voler. Le duc de Trévise, Édouard Mortier, s’empara de cette affaire dans le journal L’Illustration par un article Où doit paître la Vache d’Alan ?, qui dénonçait la mauvaise gestion du patrimoine et sa fragilité face aux revendeurs. Dans la foulée, il créa l’association La Sauvegarde de l’Art Français, aujourd’hui centenaire.
L’agrivoltaïsme bovin encore expérimental
Le Comminges aime protéger les vaches face à la cupidité. Les centrales agrivoltaïques sont-elles aujourd’hui le nouveau Veau d’or ? Un projet à Molas, près de L’Isle-en-Dodon, illustre les convoitises sur les prairies d’élevage du Comminges. Derrière l’appellation séduisante de « Village solaire » est projeté, à l’entrée du village,un terrain clôturé pour douze vaches sans veau (ou dix gestantes) sur 10,6 hectares, avec une forte concentration de panneaux solaires (41% de la surface totale) s’étageant de 2,5 à 4,5 mètres de haut, avec des caméras de surveillance, sans ombrage naturel ni terrain libre pour faire paître les vaches loin des radiations électriques. Les bovins en sont dix fois plus sensibles que les êtres humains. L’agrivoltaïsme bovin en est au stade expérimental, avec la première étude nationale lancée par l’énergéticien Valeco en septembre 2024 sur les conséquences des équipements agrivoltaïques sur le pâturage et le cheptel.
Le projet, situé sur une parcelle actuellement semi-boisée avec une riche biodiversité, est porté par la famille Frechou, dont l’exploitation de 75 hectares est installée à Coueilles, à 12 km de Molas, et par l’énergéticien Q Energy, filiale du groupe sud-coréen Hanwha, 26e fabricant mondial d’armement. Le jeune agriculteur, Antoine Fréchou, recevra une aide financière à l’installation de 152 000 €. A cela s’ajoute un revenu annuel, de l’ordre de 4 000 € par an par hectare pour les parcs agrivoltaïques. Seule une minorité d’agriculteurs bénéficiera de cette rente énergétique, creusant les inégalités, alimentant des tensions et détournant les éleveurs des véritables enjeux du secteur agricole : viabilité économique, accès au foncier, prix justes.
Un parcours administratif au forceps
Après un avis défavorable en 2020, la CDPENAF (Commission Départementale de Préservation des Espaces Naturels, Agricoles et Forestiers), qui donne un avis décisif dans l’instruction du dossier, a émis en septembre 2024 « un avis favorable sous réserve d’une présence significative des bovins tout au long de l’exploitation du projet ». Doute-t-elle de la capacité du parc à garantir un revenu agricole principal et une amélioration de la production, comme le stipulent la loi APER de 2023 et le décret sur l’agrivoltaïsme de 2024 ? La maire de Molas, Joëlle Médous, a donné un avis favorable sans délibération du conseil municipal. En 2024, à la demande de Q Energy dans l’élaboration du PLUI Coteaux Nord, la communauté de communes 5C, favorable au projet, a accepté le déclassement de la parcelle de zone naturelle (N) à agricole (A) pour faciliter l’implantation de la centrale.
Impacts sur la biodiversité et l’activité locale
Les travaux impliqueraient l’artificialisation de la terre avec 5 800 m2 de pistes et zones empierrées, détruisant un réservoir écologique (oiseaux, pollinisateurs, faune terrestre, régénération forestière). A rebours des recommandations du CNPN (Conseil National de la Protection de la Nature) et de l’objectif de Zéro Artificialisation Nette, le projet consommerait des espaces naturels boisés au lieu de privilégier les zones déjà anthropisées. Le risque de pollution est aggravé par les épisodes de grêle, de plus en plus fréquents et violents, et d’incendie, puisque les obligations légales de débroussaillement (OLD), de 50 mètres selon le Code forestier, ont été réduites par Q Energy à 20 mètres sur la base d’un arrêté abrogé, sous‑estimant l’emprise déboisée. L’avis de la MRAe Occitanie pointe des impacts sur la biodiversité, les aléas climatiques et le bien-être animal, auxquels Q Energy a répondu par une étude d’impact lacunaire.
L’implantation de milliers de panneaux solaires et structures métalliques porterait aussi atteinte au paysage. Elle entraînerait une dévaluation des habitations voisines. Les onduleurs émettraient des nuisances sonores. Le tissu économique, social et touristique territorial, qui compte 15 entreprises, infrastructures, sites et monuments implantés à moins de 3 km autour du projet, se verrait impacté défavorablement.
En réaction, un collectif citoyen de Molas s’est constitué début novembre pour lutter contre ce projet perçu comme une opération industrielle déguisée. Il a organisé un rassemblement en face du site le 15 novembre, avec notamment les associations Sauvegarde des Terres Commingeoises et Volvestre Survolté, pour sensibiliser les 60 personnes présentes, au projet et à l’enquête publique en cours jusqu’au 3 décembre (adresse e-mail pour écrire un avis : ). La décision finale reviendra au Préfet avec la validation ou le refus du permis de construire. »
« François Levassort, Président de l’association Sauvegarde des Terres Commingeoises »
www.terrescommingeoises.fr











