Sous les arcades de l’Hôtel de Ville mercredi 15 juillet, Marie-Anne Babin, dentellière professionnelle diplômée, a installé son étal couvert de fines merveilles. Cet événement s’inscrit dans le programme de présentation des savoir-faire locaux proposé par l’Office du Tourisme de Saint-Gaudens. Toute la matinée, elle a offert aux passants subjugués une démonstration de cet art ancestral qui requiert geste sûr, technique complexe, patience et créativité.
Un coup de foudre
Marie-Anne Babin, originaire du Poitou-Charente, habite près de Lannemezan dans les Hautes-Pyrénées. Elle donne des cours à Montréjeau, propose des stages, des formations, des animations et expose ses œuvres dans des salons et divers événements sur la région. « J’ai découvert la dentelle aux fuseaux il y a plus de trente ans par hasard, confie Marie-Anne, au cours d’une démonstration comme celle d’aujourd’hui, et j’ai eu le coup de foudre. Quinze ans plus tard, une dentellière m’a appris le maniement des fuseaux et j’ai suivi des cours par correspondance pendant 4 ans à l’école du Puy-en-Velay, que j’ai rejointe ensuite pour continuer ma formation sur place. J’ai obtenu à 59 ans le CAP qui couvre toutes les catégories de dentelles spécifiques à chaque région de France, et le Brevet des Métiers d’Art, qui englobe les dentelles internationales. » Elle s’adonne à son art avec ferveur, en y exprimant son talent, sa rigueur, sa dextérité et son inventivité.
Dentelles à foison
Ce métier ancien et confidentiel a peu de débouchés, il faut aller à Paris ou dans les métropoles, où de grandes maisons couture et des créateurs de mode peuvent embaucher. Les autres possibilités sont l’artisanat d’art indépendant et l’enseignement. Marie-Anne a fondé sa micro-entreprise et se consacre avec ferveur à la transmission de son art.
En France, les plus célèbres dentelles historiques viennent de Valenciennes, d’Alençon, de Bayeux, de Bretagne, de Chantilly, de Savoie, du Puy, de Calais, etc., où des ateliers et manufactures offraient du travail aux ouvrières. A partir de la fin du XIXème siècle, le métier déclina. La dentelle aux fuseaux s’articule en quatre familles, la guipure, la Blonde, le lin de Malines, le fil d’or ou d’argent, caractérisées chacune par des motifs et des utilisations spécifiques.
Un art de luxe en plein essor
Mais il n’a pas disparu loin de là. Marie-Anne Babin utilise des fils nobles, coton, lin, soie, et même du fil d’ortie… mais aussi du fil de machine, de la laine, etc. Ses fuseaux, (petites bobines sur un manche) sont en palissandre, en ébène, en buis, en bois de violette, certains ont une grande valeur et il existe même des collectionneurs de fuseaux. Ses inspirations sont multiples, outre les schémas classiques de dessins, elle invente des modèles de bracelets, d’objets décoratifs, de décors variés, elle travaille aussi sur commande. Les motifs dessinés sur des bandes de cartons, sont piqués d’épingles autour desquelles la dentellière articule ses fils attachés aux fuseaux. Au fur et à mesure de l’entrelacement des fils, selon la technique adéquate, le motif avance. Lorsqu’il est entièrement réalisé les épingles sont ôtées. De 6 à plusieurs centaines de fuseaux peuvent entrer en action selon le dessin. Chaque motif requiert de longues heures de travail, du plus petit au plus grand, du ruban à la coiffe, de la bordure de mouchoir au voile de mariée, le temps et la dextérité exigés justifient les prix de vente. Cet art n’est pas en voie de disparition car de nombreux clubs et autres structures émergent partout en France, où les activités manuelles prennent un nouvel essor et suscitent un réel engouement.
La dentelle aux fuseaux, portée par des artistes du niveau de Marie-Anne Babin, gardienne d’un précieux patrimoine, a de beaux jours devant elle.
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