Tribunal Saint Gaudens : outrages, menaces, coups, crachats contre des agents du service public

Ce premier jeudi  du mois de février, ce sont treize dossiers qui ont été examinés par les juges du tribunal correctionnel de Saint Gaudens. Sept délits routiers pour des motifs divers et souvent cumulés : conduite sans permis, sans contrôle technique, sans assurance, sans le port de la ceinture de sécurité, sous l’emprise de stupéfiants, sous l’empire d’un état alcoolique, pneumatiques en mauvais état, excès de vitesse … Deux affaires de violence, de menaces et de mise en danger de personnes chargées d’une mission de service public… Deux affaires de vols, une affaire de vol sans permis de construire, une affaire de violence sur conjointe.

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Dans ce fatras d’incivilités délictueuses, un personnage s’est trouvé devant les juges pour atteinte à la fonction et à la dignité d’un policier municipal. C’était au mois d’août 2021.

Outrages et menaces contre un policier municipal

« Qu’est ce que tu as, tête de mort? Trou du cul » a-t-il lancé à un policier croisé en voiture. Illico contrôlé, il sort de son véhicule énervé, selon l’agent municipal, il pointe ce dernier du doigt et réitère ses menaces, « si je te trouve hors service, en civil, je t’éclaterai la tête ». Invité à se calmer par un ami, l’irascible conducteur repart. La version du policier municipal a été confirmée par le collègue qui l’accompagnait.

Le prévenu reconnait les outrages, mais ne se souvient pas des menaces

A la barre, le prévenu dit ne plus se souvenir des faits, mais il ne nie pas pour autant les menaces, « c’est possible, j’étais vraiment énervé, et dans ces cas là tout sort ». Il reconnait les injures. Il affirme aussi, parlant du policier municipal, « dès qu’il me voit, il me contrôle ». Il déclare aussi qu’il le nargue jusque devant chez lui.  S’agissant des autres policiers municipaux, il déclare « avec les autres, je m’entends bien ». Lors de son audition préalable, il avait néanmoins déclaré « j’ai des problèmes avec tous les policiers municipaux ».

La mise en garde de la procureure

La procureure : « on a compris le climat qui règne entre le prévenu et les policiers municipaux ». Elle en appelle à « l’attitude d’un adulte responsable face à un uniforme pour éviter les outrages et les menaces, avec la notion de respect à avoir envers les forces de l’ordre ». Elle invite le prévenu à se demander « quelle serait la meilleure posture à adopter » parce qu’il « va falloir éviter de répéter ces procédures ». En attendant, le prévenu « doit répondre des faits reprochés ».

La procureure demande à ce qu’il soit puni d’une amende de 360 €, soit 6€ pendant 60 jours « une sanction personnelle suffisamment contraignante pour qu’elle ait du sens ».

A la présidente qui lui demande alors « qu’est ce que vous pensez des conseils donnés (par la procureure) ? », le prévenu répond « je ne sais pas ».

Verdict

La présidente a reconnu le prévenu entièrement responsable des faits reprochés et l’a condamné à la peine demandée par la procureure, 360 € d’amende. Elle l’a condamné aussi à payer 200 € à titre de dommages et intérêts à la partie civile (le policier municipal qui n’était pas présent à l’audience).

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Autre affaire traitée par le tribunal correctionnel, ce même 3 février 2022, aussi chaotique en termes de comportement inapproprié, et toute aussi affligeante (même plus) dans la mesure où ce sont des sapeurs pompiers qui ont été insultés, frappés et humiliés.

Insultes, coups et crachats sur des pompiers en intervention

Une soirée de fin septembre 2021, vers 21h00, les pompiers sont intervenus, alertés parce qu’une voiture est mal garée, « au milieu de la route », avec une jeune femme à l’intérieur qui paraissait inanimée. Dans l’automobile, les secouristes vont aussi découvrir des canettes de bière et une odeur de vin.

Insultes, coups et crachats

Revenue à elle, ou simplement réveillée par les pompiers, la jeune femme les insulte : « connards, putes, enculés », selon les termes rapportés par la présidente du tribunal qui lit les comptes-rendus d’auditions. Elle distribue des coups et  cherche à s’enfuir quand les pompiers disent vouloir appeler les gendarmes. Les agents du SDIS la rattrapent et se voient obligés de la plaquer au sol pour réussir à la retenir, malgré elle…et ses crachats.

A l’arrivée des forces de l’ordre, la prévenue change illico de comportement, plus d’injures, plus de menaces. Elle déclare avoir pris des médicaments en début de soirée pour dormir, avoir bu 2 ou 3 verres de vin sans avoir mangé, et s’être assoupie au bord de la route. Elle explique aussi avoir des problèmes personnels dont elle refuse de parler  (elle avait des « coquards » dus à des violences antérieures aux faits examinés par le tribunal).

A tribunal, la prévenue déclare « je me suis sentie agressée (par les pompiers), il se peut que je les ai touchés, je ne sais pas comment » ; elle déclare avoir eu « une réaction de défense envers des pompiers maladroits et agressifs ». A la présidente qui lui demande si elle reconnait avoir porté des coups, elle répond « en me débattant certainement, je demandais qu’on me lâche ».

L’un des deux pompiers présent, appelé à la barre, explique qu’ils se sont d’abord demandé en arrivant sur les lieux, si la prévenue était consciente. Elle leur a ensuite tenu des propos « sans queue ni tête » auxquels ils ne comprenaient rien. Tout allait bien pendant le bilan qu’ils ont effectué, mais elle a voulu partir quand ils ont annoncé l’arrivée des gendarmes, elle a « haussé le ton », proféré des insultes et s’est éloignée en trébuchant : « on a été obligés d’aller vers elle et de la stopper, c’était une mesure adaptée à la situation ».

L’avocate des parties civiles : l’humiliation et l’appréhension des pompiers

L’avocate des parties civiles (les pompiers) a souligné la recrudescence des violences physiques et verbales. Elle constate que les faits sont reconnus par la prévenue, avec des crachats « qui visent à humilier » les pompiers dont elle remet en cause le professionnalisme. « Le changement de comportement à l’arrivée des gendarmes montre que la prévenue se maitrise dès qu’elle le veut ». L’avocate insiste aussi sur le sentiment d’appréhension généré chez les pompiers par ces comportements violents qui se répètent.

Elle demande 800 € par personne pour 2 pompiers, 600 € pour deux autres pompiers, 1€ symbolique pour le SDIS de la Haute Garonne.

La procureure demande une peine à des travaux d’intérêt général

La procureure « ne souscrit pas aux explications » de la prévenue, « au réveil, on peut comprendre, mais en quelques secondes on prend conscience que nous avons en face de nous l’uniforme de ceux qui nous portent secours ». Les insultes, les crachats, « comportement humiliant et violent, il faut en répondre vis-à-vis de personnes en charge d’un service public ».

La procureure demande 70 heures de travaux d’intérêt général à accomplir dans les 18 mois, sous peine de 2 mois de prison en cas d’inexécution.

La prévenue : des justifications renouvelées jusqu’à la fin de l’audience

Rappelée à la barre pour lui permettre de s’exprimer avant le délibéré, la prévenue tient absolument à replacer dans leur « contexte », selon elle, ses crachats: elle les a justifiés parce qu’elle avait les bras et les jambes immobilisés par les pompiers, ce n’était « pas pour insulter ». « Je change de comportement avec les gendarmes, dit-elle, parce que mon comportement correspond au leur ». Quand la présidente lui demande si elle est d’accord pour une peine de travaux d’intérêt général, elle répond « oui ».

Verdict

La présidente a donné suite au réquisitoire du ministère public et condamné la prévenue à 70 heures de travaux d’intérêt général (sous peine de 2 mois de prison en cas d’inexécution), et à régler la somme de 200 € à chacune des quatre parties civiles, plus 1€ symbolique au SDIS.

 

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